Jamel Saber

Réformes du Travail d’Intérêt Général en Tunisie (3/3) ?

l’incarcération a plus de probabilité de transformer un délinquant en un criminel qu’en un citoyen modèle !

La surpopulation carcérale représente un problème dans les prisons tunisiennes. En 2021 la majorité des prisons comptent plus de 150% de détenus. Les détentions provisoires ainsi que le recours à la détention pour des délits mineurs ne font qu’augmenter cette population carcérale. Selon la Loi de Finances Rectificative 2022, les prisons et les centres de rééducation des délinquants mineurs ont coûté 39,545 MD, dont 30,426 MD pour les prisons (En 2016 un détenu coûtait 23,500 dinars par jour, compter le double en 2023 !).

En tunisie un détenu coûte en moyenne à la société environ 18.000 dinars par an ! (32.000 € en France)

Avec un nombre de détenus d’environ 22.000 entre 2017 et 2019, la politique carcérale semble stagner ces dernières années. Le taux d’incarcération de 181 personnes pour 100 000 habitants, fait de la Tunisie le 2ème pays d’Afrique du Nord avec le taux d’incarcération le plus élevé. Sachant que la capacité d’accueil des établissements pénitentiaires étant de 18 000 individus.

Tunisie 2ème pays d’Afrique du Nord avec le taux d’incarcération le plus élevé

La surpopulation carcérale est la cause première de conditions de détention « en deçà des standards internationaux », ne permettant pas la réinsertion des détenus, avec pour conséquences des difficultés de réhabilitation et intégration sociale des prisonniers. Ce problème pourrait être résolu avec le respect des délais de la garde-à-vue, la fixation de délais raisonnables pour les procès devant la justice, ainsi que l’application des peines alternatives.

Pour lutter contre la surpopulation carcérale le recours aux alternatives au lieu de l’incarcération d’office

Une des actions prioritaires pour la lutte contre la surpopulation carcérale le recours aux alternatives au lieu de l’incarcération d’office. Entre autres le « Travail d’Intérêt Général » (TIG) qui l’idéal devrait s’appliquer quand vous êtes mineur(e)s plus de 16 ans au moment du procès, et si l’infraction passible de sanctions pénales pour laquelle vous êtes jugé a été commise après vos 13 ans. Ou pour les adultes poursuivi(e)s en justice pour un délit : Acte interdit par la loi et puni d’une amende, et/ou d’une peine d’emprisonnement inférieure à 10 ans en France (actuel 1 an en Tunisie) passible d’une peine d’emprisonnement. Ou pour une contravention : Infraction que la loi punit d’un palier d’amende.

Le « TIG » dans le cadre d’une « peine de substitution » au lieu de vous infliger une peine de prison ou une forte amende

Le tribunal devrait vous condamner à effectuer un TIG, dans le cadre d’une « peine de substitution », au lieu de vous infliger une peine de prison ou une forte amende. Le TIG est un travail gratuit effectué sous contrôles au bénéfice de la collectivité, au sein d’un service public ou au sein d’une association.

Le « TIG » est effectué sous contrôles au bénéfice de la collectivité, au sein d’un service public ou au sein d’une association

Les peines de substitution appelée aussi « peines privatives ou restrictives de droit », l’idéale elles devraient englober notamment la peine de jours‑amende, les stages (de citoyenneté, de sensibilisation à la sécurité routière, de responsabilité parentale etc.), les confiscations (de véhicule, arme, etc.), les interdictions (d’exercer certaines activités professionnelles, de paraître dans certains lieux, etc.). Elles devraient correspondre également, aux peines complémentaires lorsque celles‑ci sont prononcées à la place des peines principales encourues (par exemple la peine complémentaire de suspension du permis de conduire pour un délit routier).

vous devez donner votre consentement avant que la mesure « tig » soit adoptée

C’est la juridiction qui vous juge pour une infraction : Acte interdit par la loi et passible de sanctions pénales qui devrait décider de la mise en place du TIG : tribunal correctionnel, tribunal pour enfants ou juge des enfants. Mais vous devez donner votre consentement avant que la mesure soit adoptée.

Le poste de travail du « TIG » serait adapté à votre situation personnelle et qui pourrait favoriser votre réinsertion sociale et professionnelle

Le poste de travail sur lequel vous allez effectuer le TIG devrait être choisi par le « Juge de l’Application des Peines » (Jap), ou par le directeur du service pénitentiaire d’insertion et de probation. Ils devraient choisir un poste de travail qui serait adapté à votre situation personnelle et qui pourrait favoriser votre réinsertion sociale et professionnelle.

Le « TIG » pourrait consister à faire des Travaux: d’amélioration de l’environnement naturel, d’entretien du patrimoine, de solidarité…

Le TIG pourrait consister à faire l’une des tâches suivantes : Travaux d’amélioration de l’environnement naturel (par exemple, jardinage) ;  Travaux de réparation des dégâts liés au vandalisme (par exemple, peinture, vitrage) ;  Travaux d’entretien du patrimoine (par exemple, restaurer un bâtiment historique) ;  Accompagnement des victimes (par exemple, des victimes d’accidents de la route si vous avez commis un délit: Acte interdit par la loi et puni d’une amende et/ou d’une peine d’emprisonnement inférieure à 5 ans routier) ;   Travaux de solidarité (par exemple, aides aux personnes âgées, aux personnes défavorisées).

Les « tig » devraient être adaptés aux mineurs et présenter un caractère formateur, ou de nature à favoriser l’insertion sociale des jeunes condamnés

Pour les mineurs, le juge des enfants fixerait après le procès le type exact des travaux à effectuer. Les travaux devraient être adaptés aux mineurs et présenter un caractère formateur, ou de nature à favoriser l’insertion sociale des jeunes condamnés.

durées des « TIG » devraient varier en fonction de l’infraction, entre 20 et 400 heures

La durée du TIG serait choisie par le tribunal ou par le Jap entre un minimum et un maximum fixés par la loi. Ces durées devraient varier en fonction de l’infraction, entre 20 et 400 heures. Le TIG devrait être effectué dans un délai fixé par le tribunal ou par le Jap,  sans dépasser 18 mois.

Le « TIG » ne donnerait lieu à aucune rémunération, ni à des remboursements de frais (frais de transport et ou de repas)

Le TIG ne donnerait lieu à aucune rémunération, ni à des remboursements de frais (frais de transport et ou de repas). Si vous êtes déjà en activité professionnelle, vous devriez effectuer le TIG en dehors de vos heures de travail.

Si vous êtes déjà en activité professionnelle, vous devriez effectuer le « TIG » en dehors de vos heures de travail

Si vous n’exécuterez pas la peine de TIG dans le délai de 18 mois, ou si vous ne respecterez pas les obligations qui vous ont été imposées dans le cadre du TIG, vous pourriez subir des sanctions. Le tribunal devrait fixer la peine encourue en cas de non-exécution du TIG. Le Jap pourrait décider de mettre à exécution la totalité ou une partie de la peine prévue par le tribunal (amende ou peine d’emprisonnement).

Si le « TIG » a été accompli dans les temps 18 MOIS MAXI, votre peine est considérée comme exécutée

En Tunisie bien qu’elles soient prévues depuis 1999 dans le Code pénal (loi n°99-89 du 2 août 1999), les peines alternatives le TIG surtout, restent faiblement appliquées par le pouvoir judiciaire qui opte plutôt et dans la majorité des cas pour l’emprisonnement. Une accélération du travail de réforme du Code pénal et du Code de procédures pénales s’impose afin de trouver des solutions aux obstacles qui empêchent le changement de la politique pénale.

Une accélération du travail de réforme du Code pénal et du Code de procédures pénales s’impose

Néanmoins, des efforts récents semblent
indiquer une volonté de remédier à la situation. En 2018 a débuté la mise en place opérationnelle de 6 bureaux de probation en Tunisie en sus d’un bureau existant à Sousse depuis 2013. Le lancement des bureaux de probation a été précédé de la formation de 20 agents de probation, ainsi que de la rédaction
d’un manuel tunisien de la probation.

EN TUNISIE DEPUIS 1999 À CE JOUR LE RECOURS AU « TIG » EST « timide » !

Plus de 5 000 personnes condamnées à des peines de prison ont bénéficié de peines alternatives, de peines commuées en TIG, mais en majorité dans le cadre de la liberté conditionnelle, a déclaré Sinène Zbidi, juge d’application des peines au Tribunal de première instance de la Manouba.

Au ministère de la justice de réformer et booster le « tig » DÈs 2024 pour l’intérêt général

Les efforts du Ministère de la Justice et de
la Direction Générale des Prisons et de la Rééducation (DGPR) dans la mise en place des bureaux de probation vont ainsi dans le bon sens. Néanmoins, ces structures demeurent sans cadre légal de mise en œuvre et manquent de moyens pour mener à bien leur mission.

La quasi-totalité des mesures mises en œuvre par les bureaux de probation concernent des libérations conditionnelles !

Il est également important de noter que la quasi-totalité des mesures mises en œuvre par les bureaux de probation concernent des libérations conditionnelles, qui sont des mises en liberté anticipées des personnes ayant purgées une partie de leur peine de prison, et non pas de véritables mesures alternatives à l’incarcération (TIG, contrôle judiciaires, assignation à domicile…). Enfin, seuls 4 des 7 bureaux de probation prévus sont actuellement fonctionnels (Gabès, Sousse, Bizerte et Monastir) !

Modification du code pénal pour que le « TIG » s’applique aux peines d’emprisonnement  inférieures ou égales à 5 ans au lieu de 1 actuel (10 ans en France)

Mes demandes citoyenne relatives aux recours aux peines alternatives surtout pour le TIG à l’incarcération d’office, comme suit :

1 /  Le Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) devrait sensibiliser les magistrats au prononcé des peines alternatives, surtout le TIG.

Le « tig » apporte surtout des gains probants en dépenses publiques

2 / Le Ministère de la Justice devrait favoriser la mise en place d’un mécanisme de coordination réunissant les acteurs concernés par l’opérationnalisation des bureaux de probation (magistrats, avocats, DGPR, organisations de la société civile…), afin d’identifier les besoins, d’octroyer les moyens humains et de cartographier la disponibilité d’opportunités de TIG.

4 des 7 bureaux de probation prévus sont actuellement fonctionnels (Gabès, Sousse, Bizerte et Monastir) !

3 / Dans le cadre des réformes du code de procédure pénale et du code pénal, le gouvernement et l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) devraient s’assurer, notamment :

– Modification du code pénal pour que le TIG s’applique aux peines d’emprisonnement  inférieures ou égales plutôt à 5 ans et non plus à 1 année actuelle (10 ans en France) ; D’institutionnaliser le juge d’exécution des peines et renforcer ses prérogatives et moyens ( financiers logistiques et humaines).

Institutionnaliser le juge d’exécution des peines et renforcer ses prérogatives et moyens (financiers logistiques et humaines)

La mise en œuvre réelle et effective du TIG en Tunisie, afin de lutter contre la surpopulation carcérale qui pose un problème non seulement pour les détenus, mais aussi pour les agents. Mais surtout pour assurer sous contrôles judiciaires convenablement tous les travaux qui concernent les TIG. Ceci apportera pour le pays moins de chaos, plus de discipline, de « patriotisme forcé », avec un environnement plus propre et autres biens faits, mais surtout de gains probants en dépenses publiques.

 

Quitter la version mobile