6 semaines de grève générale ouverte des magistrats : Mais payées quand même ?

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Selon l’annonce publique du Président de l’AMT*, que le Code du travail ne s’applique pas aux magistrats. Et donc pas de « coupures » de salaires. À contrario celle du Président de l’UMA*, affirme que pas de travail accompli, pas de rémunération. Qui à raison, à suivre la décision du Chef de gouvernement H. Mechichi ?

Comme justiciable, cette grève est une occasion propice, pour s’enquérir sur le bilan du pouvoir judiciaire dans mon pays, de 2011 à ce jour. Tout d’abord la rémunération mensuel d’un magistrat débutant est de 2.500 dinars, et atteint les 3.500 dinars en fin de carrière (en moyenne 3.200 dinars net). Les magistrats sont « représentés par 6 entités » :  AMT, SMT, ATFJ, UMCC, UMA et ATJM*.

En 2019, Le Ministère de la Justice est doté d’un budget de 655 millions de dinars. Composé de 2.156 magistrats en exercice. Avec 4.728 auxiliaires de justice. Et aussi 2,3 millions d’affaires de droit commun en cours de traitement. En moyenne un magistrat traite 1.300 dossiers par an. C’est beaucoup trop. Dorénavant faut l’alléger, pour être conforme aux normes internationales, ceci pour accomplir à bien sa mission. Rendre Justice.

Ainsi donc suite aux mouvement de protestations par les magistrats, pour réclamer à raison :  L’amélioration des conditions de travail dans les tribunaux, celles aussi matérielles des juges et la réforme de la justice. Grève générale ouverte observée depuis le 16 novembre 2020. La principale raison de cette grève, c’est l’état délétère de la justice tunisienne.

Évidement comme justiciable d’une part, je soutiens à 100% les 10 revendications des magistrats. Mais je considère que la solution idéale, doit être via une vision globale, sur la Justice en Tunisie.

Et pour cause d’une autre part selon Ahmed Souab « Il y a trois catégories de magistrats : ceux qui considèrent leur travail comme une mission, et peu leur importe la rémunération. Ceux qui sont des corrompus (ils existent et ils existeront toujours dans tous les secteurs). Et dernièrement, il y a des magistrats dont la situation financière, les rend faibles face à la tentation de la corruption ».

Mais aussi selon l’étude du « Forum tunisien des droits économiques et sociaux » (FTDES), sur l’extrémisme violent. Montre que 82.4% des interrogés, pensent que les lois ne s’appliquent pas de la même manière pour tous.

La perception populaire dénonce donc la politique, de « deux poids deux mesures » dans les traitements des affaires. Les tunisiens ont mal à leur justice. Ils la trouvent tantôt trop lente, tantôt trop expéditive. Ils la jugent tantôt trop sévère, tantôt trop clémente ou laxiste. Bref une justice aléatoire.

Comme citoyen, contribuable, et surtout justiciable, j’appelle donc expressément à :

  • L’édiction de lois primordiales pour le bon fonctionnement de la justice qui n’a pas encore eu lieu depuis 2011. Il s’agit de la loi organique sur les magistrats, celle organique sur l’inspection générale et le code de la justice administrative.
  • Booster l’activation de l’inspection générale, organe de contrôle des activités des magistrats, qui était pratiquement mise au frigo. Elle est dépourvue de moyens d’action et il n’y a pas de volonté politique pour y remédier.
  • Établir le Règlement intérieur et le Code de déontologie du magistrat, n’ont pas encore été émis par le dit Conseil supérieur de la magistrature (CSM), faute de volonté.
  • Révision de la Politique pénale de l’État, avec entre autres, l’introduction des peines alternatives. Pour dégraisser nos prisons surpeuplées. À savoir que le coût prisonnier est de 23 dinars par jour, soit 8.400 dinars par an.
  • Médiatiser les magistrats corrompus.
  • À élire au Suffrage universel, le Procureur de la République, à l’échelle Nationale et régionale.

Au final les tunisiens réclament donc des preuves immédiates de l’impartialité, et de l’efficacité de la justice. Les magistrats ont un devoir de redevabilité. Ils doivent aux tunisiens la vérité, autrement la révolution demeurera inachevée.

Sachant que la justice “statue au nom du peuple“, et exécute le jugement au nom du Président de la République Tunisienne. Sachant aussi que les Magistrats ne sont pas des élus du Peuple, mais désignés en fonction de critères.

Malheureusement dans mon pays, les Magistrats sont pratiquement hors de tout contrôle. Le CSM « inerte », ne sanctionne pas. Le Ministère de la Justice ne peut agir. Le contrôle de la justice par un organisme indépendant de tous les pouvoirs n’existe pas. Tous les auxiliaires de justice sont aussi pratiquement hors de tout contrôle. De nombreuses erreurs judiciaires restent inconnues. Infrastrures, agencements, matériels, numérisations et personnels qualifiés manquent cruellement.

Faut donc après épuration du Ministère de la Justice, de ses magistrats et autres auxiliaires véreux par centaines. Une mise en place d’une justice indépendante, et autonome financièrement avec un budget qu’il faudra allouer dorénavant à la Justice, environ 5 % du budget de l’Etat (soit environ 2,5 milliards dinars dès 2021). Ceci pour lui rendre sa noblesse, et sa place de leader dans notre transition démocratique.

L’instabilité politique n’avait pas facilitée la mise en œuvre de réformes structurelles et pérennes. Ceci avec 9 gouvernements en 9 ans ! J’espère qu’avec la concrétisation du « Dialogue National » à venir en 2021, côté politique pour les 3 pouvoirs, celui de la Justice, fera l’objet de révisions structurelles profondes. Sous une 3ème République efficace.

Et pour cause, à mesure que la justice est forte, que le juge est immunisé, et que les magistrats serrent les rangs, la situation du pays s’améliorera.

Et que surtout la justice étant la pierre angulaire de la démocratie.

Quand la justice va tout va.

 

* « Syndicat des magistrats tunisiens » (SMT). « Amicale des magistrats tunisiens » (AMT). « Association des femmes juges (ATFJ) . »Union des magistrats de la Cour des Comptes » (UMCC) . »Union des magistrats administratifs » (UMA). « Association tunisienne des jeunes magistrats (ATJM) ».

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