Selon “Transparency International”, la corruption consiste en l’abus d’un pouvoir reçu en délégation à des fins privées. La Corruption est un phénomène social, politique et économique complexe, qui touche tous les pays. Elle sape la démocratie et l’État de droit, entraîne des violations des droits de l’homme, fausse les marchés, dégrade la qualité de vie et favorise la criminalité organisée, le terrorisme et d’autres menaces pour la sécurité humaine.
Elle contribue à l’instabilité et à la pauvreté et constitue un facteur dominant qui conduit les États fragiles à la déliquescence. Sachant que les causes générales de la corruption sont une mauvaise gouvernance due à un cadre législatif flou, un système judiciaire inadéquat qui encourage l’impunité, manque de transparence et de responsabilisation, manque de liberté de presse. Mais aussi absence de toute politique anti corruption préventive, institutions faibles, faibles salaires des fonctionnaires, culture administrative et corporatiste peu propice et enfin des aspects culturels qui favorisent la corruption.
Malheureusement c’est le cas de la Tunisie “post révolution”. Sachant que les formes de corruptions sont, les dessous de table, La fraude, l’extorsion, le favoritisme, népotisme, Collusion, le détournement de fonds.
La grande corruption étant une corruption à haut niveau où les décideurs politiques créant et appliquant les lois, utilisent leur position officielle pour promouvoir leur bien être, leur statut ou leur pouvoir personnel. La petite corruption étant bureaucratique dans l’administration publique. Sachant aussi qu’une récente étude de la Banque Mondiale ( BM ) rapporte en effet que plus de 40 portefeuilles d’actions et d’obligations, 367 comptes en banques et environ 400 entreprises, dont certaines n’opèrent pas en Tunisie, 220 entreprises étroitement liées à la famille du dictateur B.ALI et sa femme, sont issus d’un enrichissement scandaleux.
Les experts de la commission de la BM évaluent à 13 milliards de dollars la valeur de l’ensemble, soit plus d’un quart du PIB du pays. Cette même commission a épluché les décrets signés par le despote en tant que Président de la République pendant 23 ans. Le résultat est confondant, la loi a servi à promouvoir les intérêts du clan et à le protéger de la concurrence.
Vingt-cinq décrets promulgués au cours de cette période exigeaient de nouvelles autorisations préalables de l’administration dans quarante-cinq secteurs différents, imposaient de nouvelles restrictions à l’arrivée d’investissements directs étrangers (IDE) dans vingt-huit secteurs, donnaient des avantages fiscaux spécifiques aux « amis ».
Conséquence, une bonne part des bénéfices du secteur privé revenait à ces 220 entreprises proches du régime. Les données disponibles récentes sur la corruption en Tunisie montrent l’émergence d’une Mafia de l’argent et de la contrebande impliquant de Hauts cadres, qui brassent des dizaines de milliards de dinars par un. Il n’est pas non plus exclu que de nouvelles formes de criminalité et de liquidation physique voient le jour.
La corruption devient donc à présent une grave atteinte à notre sécurité nationale. Sachant également que l’Instance nationale de lutte contre la corruption (INLCC) , crée par le décret-loi 2011-120 du 14 novembre 2011, est une continuation de la « Commission d’investigation sur les affaires de corruption et de malversations » (CICM). Cette dernière a été mise en place immédiatement après la révolution pour enquêter sur les affaires de corruption sous le régime Ben Ali. La Commission a pu recevoir et traiter quelque 10.000 cas ou affaires de corruption. Elle en a déférée une infime partie moins de 5% au Parquet. Samir Annabi, président de l’INLCC, a critiqué le rôle des gouvernements successifs, de l’administration et la justice dans la lutte contre la corruption.
L’Instance, selon lui, a été confrontée à plusieurs difficultés dès sa création après les élections de 2011, avec une absence totale de structure, de statut pour le personnel, d’organisation et de communication. D’autres difficultés importantes, selon Samir Annabi, résident dans l’environnement du travail. D’abord l’hostilité de la justice, ensuite celle de l’administration qui met les bâtons dans les roues envers l’Instance, car c’est là que réside le cœur de la corruption notamment en matière de marchés publics et autres.
Par ailleurs, contrairement aux autres instances, ISIE, HAICA et l’IVD avec 22 millions de dinars pour le budget 2016, l’INLCC n’a pas de budget propre, que des miettes 390.000 dinars dont 210.000 sont destinés à la location annuelle du bâtiment administratif, alors que la loi le prévoit clairement.
Et c’est malheureusement le cas encore à ce jour même après la nomination récente de Chawki Tabib à sa place, avec un état des lieux de travail décevants, électricité coupée dans certains étages et téléphone hors de fonction, avec un manque flagrant de fonctionnaires, bref une INLCC abandonnée à la dérive.
Conséquences immédiates de ce laisser aller prémédité pendant 5 ans, l’Organisation non gouvernementale “Transparency International”a récemment publié sa “21ème édition de l’Indice de perception de la corruption” qui mesure le niveau de corruption dans le secteur public. La Tunisie a régressée de 14 pts dans le classement de la perception de la corruption dans le dernier rapport (2011 par rapport à 2010), sachant q du 33ème rang en 1998, elle figure à la 76ème place en 2015 avec une note de 38 sur 100.
Les secteurs les plus corrompus et par ordre décroissant sont : les partis politiques, la police, membres du parlement, fonctionnaires du gouvernement national et local, juges magistrats et les autres.
Selon “Standard and Poor’s”, les investisseurs ont une probabilité allant de 50 à 100 % de perdre la totalité de leurs investissements dans un délai de cinq ans dans les pays connaissant divers degrés de corruption. La corruption sape donc la confiance des investisseurs tunisiens et étrangers, dans les institutions démocratiques et l’Etat de droit, nuit à l’économie nationale et prive les pouvoirs publics des recettes fiscales dont ils ont besoin.
Aussi pour déclarer la guerre et combattre cette gangrène fatale pour l’essor de mon pays la Tunisie, je propose ce qui suit :
1/ Adopter en priorité à l’ARP, une Instance constitutionnelle indépendante “ l’Instance de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption” (IBGLCC), jouissant de la personnalité morale et de l’autonomie administrative et financière. L’État s’engage à mettre à la disposition de l’Instance tous les moyens humains et matériels nécessaires à la bonne exécution des missions qui lui sont dévolues, pareil que la HAICA et l’IVD.
2/ L’Instance définit et veille au respect des principes généraux de la bonne gouvernance dans les secteurs public et privé, concernant en particulier les mesures et règles s’appliquant aux institutions publiques et privées et à leurs organes de décision, d’information et de surveillance et permettant d’assurer leur bon fonctionnement et contrôle. Elle œuvre à asseoir la culture du respect de la légalité, de l’égalité de tous devant la loi, et de la prévention de toutes les formes d’abus, corruption et impunité.
3/ Elle concourt à la promotion et à la consolidation des principes de transparence, d’intégrité, de responsabilité sociétale et de reddition des comptes dans les secteurs publics et privés.
4/ Elle participe à l’élaboration des politiques publiques de bonne gouvernance, de prévention et lutte contre la corruption, en s’inspirant des principes universels en la matière. Surtout avec l’assistance et l’expérience des pays scandinaves comme la Suède, et l’aide financière matérielle et humaine de « l’Organisation de coopération et de développement économiques » (OCDE) et/ou du « Programme des Nations unies pour le développement » (PNUD).
5 / Elle participe à l’élaboration des mesures nécessaires pour améliorer la transparence, la rationalité, l’efficacité et l’efficience de l’administration publique, y compris en ce qui concerne son organisation, son fonctionnement, ses procédures de décision, ses finances et son patrimoine.
6/ Elle reçoit et contrôle les déclarations de patrimoine et d’intérêts des personnes qui en sont assujetties en application de la constitution et de la loi, ceci à la place de la cour des comptes, inefficace à ce jour.
7/ Elle contribue à contrôler le passage des agents du secteur public vers le secteur public concurrentiel ou vers le secteur privé.
8/ Elle contrôle la mise en œuvre des mesures destinées à accroître la transparence du financement des partis politiques et des campagnes électorales, sans oublier les ONG.
9/ Elle participe à l’élaboration d’une politique pénale cohérente en matière d’incrimination et de répressions sévères de la corruption. L’administration devra se doter de tous les moyens pour combattre le corrompu, et s’armer d’une panoplie de sanctions financières, administratives et pénales pour qu’il ne recommence pas . Le corrompu en faute “aggravée” serait dorénavant considéré comme un délinquant.
10/ Elle veille à restaurer la confiance envers l’Etat, avec un engagement total des autorités afin de lutter contre la corruption. Pour se faire il est indispensable de créer la « Brigade nationale de répression de la corruption ». Bref une véritable « Task Force », une brigade armée et mobile, opérationnelle sur tous le territoire national et international, avec de gros moyens humains, logistiques et financiers, agissant avec force de loi, et sous ordre de la “IBGLCC” suite à un dossier de présomption caractérisée.
11 / Elle veille à la transparence et au contrôle des procédures de disposition des biens saisis ou confisqués en application de la législation en vigueur ou des décisions de justice.
12 / Elle participe aux politiques publiques destinées à éviter les obstructions à la justice ou à empêcher l’exécution de ses décisions.
13/ Elle met en place d’intenses communications, avec la création d’outils efficaces de dénonciation de la corruption Site web, Numéro vert et autres. Démontrer aussi cet engagement via la communication publique périodique via le web, des résultats sur les poursuites engagées et les condamnations prononcées par la justice tunisienne dans des affaires de corruption.
14/ Elle engage des réformes pour la dématérialisation de l’administration, avec l’introduction du numérique, qui permettra à la fois une réduction des contacts entre agents administratifs et citoyens, et un respect strict des délais administratifs.
15/ Elle assure la protection des informateurs dans le but de protéger les dénonciateurs, les témoins, les experts, lanceurs d’alerte et les victimes de faits de corruption.
16/ Elle légitime la participation active et intense de la société civile, avec un besoin de militantisme et pas uniquement d’institutions publiques officielles, ceci en mettant en avant l’institutionnalisation des relations avec la société civile.
17/ Elle Veille à la mise en place de la politique nationale de prévention du favoritisme et des conflits d’intérêts. Mais aussi à l’interdiction de la prise illégale d’intérêts et de l’enrichissement illicite. Elle contrôle également les groupes servant des intérêts privés.
18/ Elle prévient et lutte contre la fraude et le blanchiment des produits tirés de la corruption et des biens mal acquis. Pour se faire des officiers formés pour contrer la corruption, et disposant de tous les pouvoirs de la police judiciaire : écoutes, filatures, garde à vue, commissions rogatoires et perquisitions. Il faudrait dorénavant en pratique limiter l’utilisation des billets de banque dans les payements en cash à 1.000 dinars maximum ( 1.000 € en France depuis sep 2015). Sachant que la Suède est un cas d’école en la matière, ce pays est pionnier pour éradiquer la monnaie fiduciaire, ceci dans les transactions financières au quotidien.
19/ Le Ministère publique ne doit plus dépendre directement du Ministère de la Justice donc de l’exécutif, ceci pour éviter que des poursuites judiciaires contre des corrompus soient déboutées, gelées voire ralenties.
20/ Les affaires judiciaires contre la grande corruption nationale et transnationale, seront dorénavant considérées comme “crimes contre la Nation”, et jugées par le même « Pole judiciaire », que le terrorisme, contrebandiers du marché informel, blanchiment d’argent, fraude et évasion fiscale.
Comme suite à une étude sélectionnée par le « HuffPost Tunisie », 77% des Tunisiens interrogés pensent que la corruption n’a pas cessé d’augmenter après la révolution. Et aussi que 89% pensent que le manque de volonté politique pour lutter contre la corruption est un élément favorisant la corruption. Ceci confirme donc que nos 6 Chefs de gouvernements depuis 2011, sont d’une manière ou d’une autre, directement ou indirectement, accusés “d’inertie coupable” voire de complicité passive de la corruption. Je considère que leurs indifférences manifestes, voire leurs laxismes, sont des “Crime contre la Nation”.
Au finale, la lutte contre la corruption vise essentiellement à changer la culture et les comportements des personnes, et par la même de rétablir la confiance perdue avec les investisseurs tunisiens et surtout les étrangers (IDE). Sans oublier l’essentiel celui de renflouer les caisses de l’Etat par milliers de milliards de dinars. Selon l’étude de “Global Financial Integrity”, la corruption en Tunisie est estimée à 2 % du PIB, soit 1,2 milliards de dollars par an durant la période entre 2000 et 2008 (environ 110 dollars par habitant).
Au contraire pour ma part je l’estime à 30% du PIB en 2015, c’est donc la ruine du pays. Conséquence ce “cancer” doit être éradiqué au plus vite, ceci pour l’essor du pays.
Mon essai du 11 novembre 2016 … et depuis ?